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Exposition

12 SILENCES  Nicolas Panayotou à propos de Lokiss


Le germe de cette collaboration remonte à 25 ans de cela, à Paris où j’ai pu découvrir pour la première fois les fresques murales de Lokiss. Précurseur de la scène graffiti, il faisait figure de dissident par son approche singulière et atypique d’un nouveau mode d’expression aux canons graphiques déjà bien définis.

Son langage pictural alliant abstraction géométrique et univers cosmiques était annonciateur d’une imagerie ‘futuriste’ inscrite dans une pureté et une violence visible jusqu’à maintenant dans ses différents travaux.

Ces expressions brutes et intuitives de l’expérience m’ont immédiatement séduit et fortement influencé par la suite.

Dans l’ordre des choses, l’idée de notre collaboration a ensuite pris forme dans mon atelier. On pensa alors superposer nos univers respectifs dans un palimpseste de couleurs et de formes. Lokiss imagina 12 esquisses de personnages qui feraient écho à 12 de mes tableaux : 12 personnages inscrits dans des perspectives colorées créant ainsi 2 espaces, 2 vibrations distinctes, substantielles et bidimensionnelles à la fois.

Une étrange catalyse s’est opérée :les figures solitaires sorties de la couleur ont trouvé un appui, ont rempli ou complété un univers déjà établi. Dans cette perspective, un relais s’est établi entre nos deux espaces, un espace cosmique et un espace monde où la présence anthropomorphique accentue son ancrage tellurique, son élévation cosmique comme sa chute.

Ces hagiographies aux formes sculpturales d’un nouveau temps ont vu le jour, renouant aussi bien avec les thèmes sacrés de la peinture que l’expression directe de notre époque.

Le résultat de cette alchimie constitue le « moi » porté à la connaissance, non pas le « moi » du corps physique mais un moi essentiel plongé dans une bataille silencieuse, entre naissance et chaos où la transcendance devient ivresse.

Les figures d’hommes ou d’enfants nous proposent un itinéraire à la fois spatial et mythique où les chemins ascendants ou descendants sont les mêmes. La plasticité des formes trahit une explosion, une mutation certaine qui nous propulsent dans un temps cosmique tenu par des fils tels des marionnettes où la contenance devient un cri jubilatoire et capte la libido. Alors, des colonnes érectiles du temple à l’extase des saints, la sexualité se transforme en pouvoir d’investissement.

Ces immortels résistent par le silence. Sortir de la caverne et se retourner, ne pas chercher à dissiper mais à intérioriser, telles les particules et les effluves qui entourent les personnages sortis de leurs corps afin de restaurer un lien entre le temps et le déchainement de la matière.

Tout ceci a éveillé les échos de notre propre histoire. Les territoires partagés avec Lokiss à travers cette expérience sont devenus doubles, esthétiques et politiques, car les deux sont liés, à travers une imagerie numérique produite à la main et une thématique inscrite dans la volonté de témoigner d’une quête de sens, le sentir vivre avec l’autre. Au travers d’une Histoire renouvelée.

Par cette pratique j’ai essayé d’arriver à une transcendance et je savais qu’implicitement le travail en serait marqué en portant des signes qui ne seront pas intelligibles de façon littérale mais en exposant un réel désir de me rapprocher du sympan.

 

NICOLAS PANAYOTOU – 29.08.2012

 

 

12 SILENCES   Lokiss à propos de Nicolas Panayotou


J’ai regardé ces lignes pulvérisées. Ces champs confondus. Le vide et l’avalanche des entiers. Ceux d’un ciel incendiaire ou d’une mer devant laquelle on se tait. Devant laquelle on égrène chaque infime ondulation, chaque intime silence. Ma nature, celle portée vers la violence, puis déportée vers l’inévitable colère en face des mondes aveugles qui s’écroulent. Ma nature s’exprime bruyamment.

Devant ces oeuvres, je n’ai d’abord pas retrouvé les syncopes et les contre points qui cadencent mon expression, et que celle-ci transforme par la peinture, la vidéo ou finalement, la composition musicale elle-même. J’ai du apprendre un autre temps, d’autres intrications spatiales et renouveler la grammaire de mon langage primal.

Je suis venu à travers plus que je suis venu par dessus. Je me suis immiscé plus que j’ai forcé. L’immersion fut un acte difficile et dont l’erreur m’était interdite. Mon avancement et son empreinte implicite demeuraient sans effacement possible. Envahir sans blesser. Désorganiser sans détruire. Prolonger sans noyer, sans corrompre la première partition de Nicolas. Et soi-même, ne pas se perdre tout en y jouant...

Finalement lorsque je regarde ces toiles et les personnages qui y vivent. Je me regarde souvent moi au travers de leur corps, de leur position et de leurs visages intérieurs.Moi, imaginant ce que j’allais transmettre à mon tour. Moi, corps méditant. Corps s’esquissant autre. J’essaie et je repars. Je synthétise et je disperse. Je peins par projection. Je pense ma partition. Et chaque personnage s’appuie sur ces dynamiques virtuelles, cette forêt initiale. Puis, quand je sens que ma main est prête, je cristallise un instant, je plie certaines branches, j’en écarte d’autres, et je pénètre concrètement le parcours pictural.

Chaque premier pas s’est basé sur un dessin, et cet éclaireur a tracé en préambule une architecture mentale pour chacune des rencontres à venir.

Quand j’ai découvert pour la première fois les peintures de Nicolas, j’ai vu dans ces lignes de couleurs autant de niveaux d’une introspection d’ordre mystique. Et son engouement pour la pensée agnostique m’a conforté dans le sentiment que l’extase serait le sujet majeur de notre dialogue artistique.

Dieu ne m’intéresse pas. L’antiDieu pas d’avantage. Le seul mystère cosmique suffit à mon élévation et à ma chûte. Ce qu’il y a en moi, c’est le Tout moléculaire d’un vide spatial qui se dilate à cent milliards de vies de la mienne. Est-ce mon AntiMoi ? Voilà où se situe l’étourdissement. Mon vertige réside dans ce qui terrifie le pénitent.

Mon extase a les pieds dans la boue. Le regard perdu dans la beauté des cycles aléatoires.

L’horloge est terrestre. 12 Heures. 12 Mois. 12 Silences. 12 instants cristallisés. 12 corps pris, élargis, réécrits par l’extase dont ils sont le véhicule. La chair vibre et chaque rémanence se dessine autour d’elle. Des souvenirs, des branches, d’autres chairs en gestation. Autant d’organismes qui se connectent et se subdivisent ensuite...

J’ai vu les suspensions colorées peintes par Nicolas, ces 12 horizons parfois renversés. J’ai tenté alors d’en capter l’essence, de laisser mes figurants s’enfoncer dans les ouvertures que je percevais multiples et multipliables.Les laisser me dire, vous murmurer : “C’est ici. Ce pourrait être là.”

 

LOKISS – 14.08.2012

Nicolas PANAYOTOU
LOKISS

12 Silences
( 2 + 2 ) = Peintures à 4 mains

Du 12 octobre au 31 décembre 2012

12silences

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